En mars 2021 un sondage sur les aspirations des cadres montrait que 2 cadres sur 3 avaient l’intention de changer de poste, de métier, de statut ou de réaliser une mobilité géographique dans les deux années à venir et que près d’un français sur deux envisageait de changer de cadre de vie. En septembre dernier, un article paru dans le Monde confirmait la tendance des Français à rechercher une meilleure qualité de vie dans les villes de moins de 20 000 habitants.

La théorie de l’autodétermination (Deci et Ryan, 1985) considère que tout comportement individuel est motivé par la satisfaction de trois besoins psychologiques de base : l’autonomie, la compétence et le lien social. Cette théorie repose sur une théorie plus ancienne, la théorie de l’évaluation cognitive (Deci et Ryan, 1971, 1975 et 1985), qui suggère que la motivation principale pour s’engager dans une activité, comme un travail, est la motivation intrinsèque, c’est à dire le fait de faire quelque chose volontairement, parce que la tâche est plaisante ou intéressante de façon inhérente. A l’inverse, la motivation extrinsèque fait référence au fait de faire quelque chose parce que cela mène à un résultat séparable, comme une récompense (Deci et Ryan, 2000). Les travaux de Deci et Ryan montrent aussi que les motivations extrinsèques, comme une incitation financière ou le besoin de reconnaissance, peuvent saper (c’est-à-dire réduire) l’engagement dans une activité.

Un sondage Statista de 2020 portant sur la motivation au travail des salariés français montrait que le principal facteur de motivation était la rémunération (une motivation extrinsèque) suivie, dans l’ordre, de la satisfaction du travail bien fait (motivation intrinsèque), de la reconnaissance de la valeur de son travail (motivation extrinsèque), de la qualité des relations avec les collègues (le plus souvent motivation extrinsèque), du plaisir d’apprendre (motivation intrinsèque), de l’impact de son travail sur la société et de la culture ou projet d’entreprise (motivation extrinsèque).
Six ans auparavant (2014), un sondage portant sur les motivations au travail identifiait, dans l’ordre d’importance, des motivations différentes : le sens (motivation intrinsèque), la qualité des interactions avec les collègues (le plus souvent motivation extrinsèque), l’amélioration des compétences (motivation intrinsèque), les moyens offerts (motivation extrinsèque) et les opportunités de développement personnel (motivation intrinsèque) étaient citées. La rémunération (motivation purement extrinsèque) n’apparaissait pas dans ce sondage.

Fait intéressant, un sondage de ChooseMyCompany réalisé en 2020 montrait que le télétravail avait dégradé la motivation globale parce que les répondants estimaient bénéficier de moins de perspectives d’évolution (motivation extrinsèque), qu’ils avaient moins le sentiment d’apprendre et de progresser (motivation intrinsèque) et qu’ils se sentaient moins reconnus et encouragés (motivation extrinsèque).

Si les différents sondages peinent à s’accorder sur la hiérarchie des facteurs qui motivent à travailler, la liste de des motivations identifiées reste néanmoins homogène. On y retrouve les conditions de travail, la culture ou le projet d’entreprise, la rémunération, le management (valorisation de l’ego ou de l’estime de soi) et le développement des compétences professionnelles. Etonnamment, l’équilibre vie privée et vie professionnelle n’apparait pas dans ces sondages. Probablement parce qu’aucune question ne suggérait ce facteur (les sondages pratiquent souvent les réponses assistées et non les réponses ouvertes). Pourtant, l’équilibre vie privé et vie professionnelle, ainsi que le désir de contribuer à la société en donnant du sens sont des facteurs de motivation qui apparaissent de plus en plus dans les travaux de recherche depuis le début du siècle.

Nous l’avons vu, la recherche en psychologie suggère que les motivations de type incitation monétaire ou reconnaissance aux yeux des pairs (ou de la hiérarchie) sont moins bénéfiques que le plaisir du travail. Ces recherches montrent par ailleurs que, sur le moyen et long terme, les motivations extrinsèques telles que la rémunération, les incitations ou la reconnaissance sapent la motivation intrinsèque, c’est-à-dire le plaisir de l’activité.
Dans cette perspective, un territoire comme le Comminges, qui présente un excellent compromis vie privé – vie professionnelle grâce à son cadre de vie et ses infrastructures, associé un tissu économique de taille humaine, propose une alternative séduisante aux métropoles.

Stéphane Thion